L'héroïne
La consommation d’héroïne augmente
La consommation d’héroïne tend à stagner, plutôt qu’à diminuer. On évalue à 150 000 le nombre d’usagers d’héroïne par voie injectable, dont la moitié bénéficie de traitements de substitution par la méthadone ou la buprénorphine. Il semble surtout qu’il y ait moins de nouveaux adeptes. On peut penser que le sida, qui s’est beaucoup transmis par le partage de seringues chez les usagers d’héroïne, a modifié la représentation de ce produit et de l’injection chez les usagers. Associée à la maladie et à la mort, l’héroïne a perdu nombre de ses utilisateurs au profit de substances que l’on fume, « sniffe », ou avale. Pour autant, ce n’est peut-être que transitoire, car on voit arriver dans les centres de consultations des personnes qui ont rencontré l’héroïne sur des lieux festifs, où elle est vendue (peu cher) ou donnée pour supporter les « descentes » de produits stimulants. (La descente est le moment où les effets des produits s’estompent, et où l’on peut être envahi par un vécu dépressif.)
Par ailleurs, il ne faut pas oublier que depuis le début du xxe siècle, on constate que les consommations de produits psychoactifs évoluent en fonction des modes et des ambiances sociales : produits calmants au début du siècle (morphine), stimulants dans les années folles (cocaïne), hallucinogènes lorsqu’on refaisait le monde dans les années 1960 (LSD, cannabis), stimulants encore depuis les années 1990, lorsque la performance individuelle est valorisée à l’extrême.
Les produits changent, mais les problèmes demeurent, exigeant néanmoins l’adaptation des dispositifs de prévention, de soins et de réduction des risques à ces évolutions.
Est-ce que on ne peut faire d’overdose d’héroïne qu’en se l’injectant ?
Une overdose (surdosage) d’héroïne peut se produire quelle que soit la voie d’utilisation, inhalée, sniffée, injectée. L’overdose est un arrêt respiratoire (tous les opiacés sont des dépresseurs du système respiratoire) lié à une quantité de drogue utilisée, quel que soit son mode d’utilisation. C’est une vraie urgence médicale qui peut conduire à un décès si elle n’est pas traitée à temps.
Il existe un médicament antagoniste des opiacés qui permet de réanimer les personnes en situation d’overdose de façon spectaculaire : le Narcan®. Le réveil de la personne est alors immédiat, mais elle ressent une Intense sensation de manque, qui la conduit le plus souvent à rechercher un soulagement par une nouvelle prise d’héroïne. Cela risque d’induire une nouvelle overdose, lorsque l’effet du Narcan® s’interrompt pour céder la place à celui de l’héroïne, d’où la nécessité de réanimer les personnes progressivement et de leur proposer à leur réveil un traitement symptomatique du manque, comme un traitement de substitution par méthadone ou buprénorphine.
- Plusieurs contextes favorisent les overdoses :
- l’utilisation d’un produit inconnu ou contenant une quantité de principe actif supérieure au produit utilisé habituellement ;
- la reprise de consommation après une période d’arrêt, lorsqu’un usager reprend la même quantité qu’avant l’arrêt, alors que son corps n’y est plus habitué, ne « tolère » plus une telle dose ;
l’utilisation de plusieurs produits simultanément ou successivement.
Par ailleurs, l’héroïne n’est pas le seul produit susceptible de provoquer des overdoses : c’est aussi le cas de l’alcool, ou de la cocaïne, des solvants organiques, ou des intoxications aiguës survenant dans le cadre de polyconsommations, comme par exemple les mélanges buprénorphine/alcool/benzodiazépines. Cela est alors lié à la potentialisation croisée de ces substances, c’est-à-dire la propriété qu’ont certains produits de majorer mutuellement leurs effets.
Si les processus conduisant à la mort en l’absence de soins sont alors différents (comas, collapsus cardiovasculaire), le résultat n’en est pas moins dramatiquement le même.