Indications de l'alimentation
Indications de l’alimentation entérale
Elles sont nombreuses : alimentation orale impossible ou insuffisante, augmentation importante des besoins.
En chirurgie, les indications sont les dénutritions préopératoires, les complications postopératoires, les polytraumatismes, les brûlures étendues, les résections du grêle. En médecine, tous les états d’hypercatabo- lisme et/ou de dénutrition, certaines diarrhées motrices et les syndromes de malabsorption.
Dans toutes ces situations où l’intestin est fonctionnel, la voie entérale doit être préférée. Cependant, dans certains cas (grandes dénutritions, intestin court, radiothérapie intestinale, fistules, carcinologie), les apports caloriques doivent être augmentés très progressivement. Pendant cette phase d’adaptation, un apport calorico-protidique complémentaire doit être apporté par voie parentérale centrale ou périphérique.
Les troubles de conscience et de déglutition sont une contre-indication relative de l’alimentation entérale. Le risque est l’inhalation du contenu gastrique. Une étroite surveillance, la position demi-assise, l’utilisation de sondes de petit calibre permettent souvent l’utilisation de la voie entérale.
La seule contre-indication absolue est l’occlusion.
Indications de l’alimentation parentérale
Si depuis 1968 il a été démontré qu’il était possible d’assurer par voie parentérale exclusive un apport calorique et nutritionnel adapté aux besoins qualitatifs et quantitatifs, à l’heure actuelle les indications de l’alimentation parentérale se sont réduites. Ces indications sont l’impossibilité, l’insuffisance et les contre-indications de la nutrition entérale. Ainsi les deux méthodes ne sont pas opposées mais complémentaires.
Quand la nutrition entérale est insuffisante (moins de 1 500 Cal) ou impossible sur une courte période (une semaine), la nutrition veineuse
périphérique est une alternative facile et peu risquée. Il est possible d’apporter par cette voie 1 500 à 2 000 Cal (glucose 5 p. 100 ou 10 p. 100 plus Intralipide) et 0,8 à 1 g Kg/j de protides.
S’il est prévu une alimentation parentérale exclusive pour une période dépassant une semaine et si l’apport calorique nécessaire est supérieur à 2 000 Cal, la voie veineuse centrale est indiquée. La mise en route d’une telle thérapeutique doit faire prendre conscience du risque qu’elle sous entend. C’est pourquoi elle doit être remplacée le plus rapidement possible par la voie entérale.
Cas particuliers
1. L’opéré. — Plusieurs facteurs doivent être pris en considération : l’état de nutrition préalable, la gravité de l’intervention et ses risques, l’intégrité du tractus digestif, l’existence ou non d’un sepsis.
Chez les malades postopérés non dénutris, le but de la nutrition est de prévenir une perte excessive de tissu maigre. Lorsque l’intervention ne touche pas le tube digestif, la reprise de l’alimentation orale est rapide. Lors d’interventions touchant le péritoine ou le rétropéritoine, ou dans les suites de chirurgie digestive réglée, une nutrition par voie veineuse périphérique permet d’attendre une semaine.
Par contre, en cas de chirurgie majeure (gastrectomie totale, résection œsophagienne, résection étendue du grêle…), le catabolisme est important, et le risque de déplétion calorico-protidique et de complications est grand. Une nutrition par voie parentérale à haut niveau calorico-azoté est justifiée (éventuellement associée puis remplacée par une nutrition entérale précoce postopératoire par gastrostomie ou jéjunostomie). C’est chez ces patients à risque qu’une nutrition pré-opératoire peut être envisagée. En cas de sepsis associé, cette hypernutrition postopératoire doit être conduite avec prudence, du fait des effets délétères possibles d’un apport énergétique important précoce.
2. Insuffisance rénale. — Là encore, la voie entérale doit être choisie en premier. Le régime est restrictif en protides (50 g/j) en l’absence de dialyse.
En cas d’utilisation de la voie parentérale on prescrit des acides aminés essentiels comme source protidique (l’azote uréique étant réutilisé comme source d’azote non essentiel), et un apport calorique suffisant (en connaissant la diminution de la tolérance au glucose et les troubles du métabolisme des lipides).
3. Insuffisance cardiaque. — Il faut se méfier de la charge osmotique et hydrique que représente la voie parentérale et préférer là aussi la voie entérale.
4. Fistules digestives. — Liées à une chirurgie complexe ou à des « stomies » réalisées délibérément par le chirurgien, elles sont des situations fréquentes et des indications classiques de la nutrition parenté- raie. Or, il est souvent possible d’apporter un mélange nutritif’parentérale, de récupérer le liquide fistuleux et de la réinstiller Îentement dans le segment d’aval.
5. Encéphalopathie hépatique. — La perfusion de solutés pauvres en aminoacides aromatiques et riches en aminoacides branchés arrvéliorerait les signes cliniques d’encéphalopathie hépatique.
Les progrès de l’alimentation entérale et parentérale permettent de proposer une assistance nutritionnelle aux malades dénutris et à haut risque en milieu hospitalier. La connaissance des bases théoriques et pratiques de l’alimentation artificielle doit permettre d’en réduire les risques iatrogéniques. Les deux méthodes sont complémentairees, mais l’alimentation entérale doit toujours être préférée lorsque l’intestin est fonctionnel. Une telle politique nutritionnelle peut aboutir à une diminution de la morbidité et de la mortalité dues à la dénutrition.