Climatothérapie
L’influence des climats sur l’homme fait l’objet de différentes approches, dont certaines s’inscrivent dans des objectifs thérapeutiques conduisant divers lieux, aux qualités environnementales reconnues, à bénéficier de l’appellation de station climatique [6]. Le caractère favorable à la santé de certains environnements climatiques est en effet officiellement reconnu à travers cette appellation, dont bénéficie un tiers environ des stations thermales françaises du fait de leur implantation à une altitude de moyenne montagne. Les éléments du climat, et plus particulièrement l’absence de pollutions urbaines ou industrielles, constituent des facteurs adjuvants à la cure thermale proprement dite. Par ailleurs, les stations thermales de bord de mer et de thalassothérapie, se situant nécessairement à proximité d’un rivage marin, allient très souvent l’utilisation des éléments naturels qui leur sont propres eaux, boues, algues notamment à l’influence des particularités climatiques qui s’avèrent susceptibles d’apporter un mieux à un organisme malade.
Climatothérapie d’altitude
C’est l’influence de l’altitude sur la santé qui a engendré le plus grand nombre de travaux physiologiques et physiopathologiques, avec étude des effets de la raréfaction en oxygène directement liée à la diminution de pression atmosphérique, de la modification de la palette des radiations solaires et du contenu en allergènes et polluants tant industriels que domestiques lorsqu’on aborde un climat de montagne.
Les relations entre climat et santé apparaissent dans ce cadre sous deux aspects de conception différente, puisque d’une part liées à la présence de facteurs nouveaux et additifs, et d’autre part par la soustraction d’éléments potentiellement nuisibles à l’organisme.
Historiquement, un développement important de la démarche climatothé- rapique s’est effectué au début du XXe siècle avec la création de très nombreux sanatoriums consacrés à la lutte contre la tuberculose, fléau médico-social vis-à-vis duquel le placement des malades en milieu de soins spécialisés, dans un environnement climatique présumé favorable, constituait à la fois une démarche prophylactique d’éloignement d’un patient pour éviter d’en contaminer l’entourage, et une tentative d’amélioration de l’état physique des malades. L’innocuité d’un lel traitement naturel possédait déjà ses limites puisque l’exposition trop brutale à une irradiation solaire était reconnue à l’origine de modifications évolutives de lésions parenchymateuses pulmonaires en voie de cicatrisation, avec déclenchement d’hémoptysies de gravité variable. Une répartition de ces patients conduisait d’ailleurs à soigner les tuberculeux respiratoires en sanatorium d’altitude, alors que ceux souffrant d’une atteinte osseuse par le bacille de Koch se trouvaient préférentiellement dirigés vers des établissements situés en bord de mer.
Il est aujourd’hui opportun de remarquer que les énormes investissements réalisés à cette époque l’ont été sur une présomption d’efficacité de prescription climatothérapique, mais dont on cherchera vainement la démonstration des effets dans des démarches épidémiologiques comparatives, telles qu’elles sont aujourd’hui exigées de tout nouvel acte thérapeutique. La reconversion de nombre de ces établissements sanatoriaux vers le traitement d’autres affections, notamment respiratoires, conduit aujourd’hui à proposer la réalisation d’études cliniques comparatives qui devraient permettre de mieux fixer les bases des indications de placements en milieu climatothérapique.
La maladie asthmatique est de prévalence croissante dans les populations européennes, du fait notamment de l’accroissement des pollutions en milieu urbain. C’est au titre de l’asthme et des affections bronchiques chroniques que différents centres spécialisés en France (Briançon, Font-Romeu, Osséja, Dieulefit, ce dernier étant spécialisé dans l’accueil de malades souffrant de bronchectasies) ou à l’étranger (Obersdorf, Berchtesgaden en Allemagne), accueillent de jeunes et moins jeunes patients : une atmosphère dépourvue des principaux polluants, y compris domestiques du fait de la raréfaction des acariens en altitude démontrée de longue date [81, améliore des situations respiratoires compromises en diminuant le nombre et l’intensité des crises, tout en induisant un effet particulièrement heureux sur le psychisme des malades et de leur entourage, notamment parental [4, 5J. D’actuels projets d’études à La Bourboule devraient permettre, par la comparaison de groupes de jeunes patients, dans une station thermoclimatique où l’élément crénothérapique se trouve associé à un séjour en moyenne altitude (aux environs de 1 000 mètres), de faire la part entre les facteurs climatothérapiques et les produits et gestes thermaux.
Les besoins économiques et sociaux ont également conduit à développer des investissements sanatoriaux dans des localisations extra-urbaines d’altitude très modérée. C’est ainsi que l’environnement climatique d’un certain nombre d’établissements de lutte contre la tuberculose a été choisi à proximité d’étendues d’eaux intérieures, et le climat de lac est aujourd’hui recherché et utilisé par ses caractéristiques de modération d’amplitude thermique et d’atténuation des violences atmosphériques : certaines stations thermales et climatiques conviennent ainsi particulièrement aux sujets fatigués ou présentant des troubles névropathiques (Evian et Divonne de part et d’autre du lac Léman). L’existence dans l’atmosphère de dérivés terpéniques d’origine végétale a également fait mettre en exergue le climat de forêt [1] : les grandes étendues de pins aussi bien que
la proximité maritime ont conduit à valoriser les possibilités climatothéra- piques de la région landaise, les stations thermales de Dax, voire de Saujon, pouvant être considérées comme bénéficiant de cette mixité de facteurs climatiques favorables à la santé.
Climatothérapie marine et thalassothérapie
Les composantes d’une cure de thalassothérapie ressortissent en effet à deux éléments naturels fondamentaux employés dans cette démarche thérapeutique utilisée à des fins curatives, mais aussi bien souvent prophylactiques comme le rappelle une définition officielle émanant du ministère de la Santé : la thalassothérapie consiste en une exploitation à des fins thérapeutiques des vertus combinées de l’eau de mer d’une part, de l’air et du climat marin d’autre part.
Les éléments particuliers de ce climat marin ressortissent à la pureté atmosphérique, l’atmosphère en haute mer étant pour sa part dépourvue d’éléments microbiens ou d’allergènes. Les températures côtières bénéficient par ailleurs d’une grande modération d’amplitude en raison du réservoir de chaleur constitué par l’eau océanique, stabilisateur thermique mais aussi hygrométrique. A ce caractère tempéré des climats marins s’oppose cependant la violence des vents, vents généraux ou brises marines porteuses d’embruns constituant de véritables aérosols susceptibles de pénétrer dans les voies respiratoires. L’ionisation atmosphérique négative et la présence d’oligoéléments, dont l’iode résultant d’un travail de concentration effectué par algues et varechs, ont été retenues comme facteurs intervenant dans la santé des curistes.
Conjointement à ces effets sur l’organisme de l’atmosphère côtière, immobile ou en mouvement, l’utilisation modérée et contrôlée d’une irradiation solaire peut venir compléter les éléments physiques du climat marin par ses effets sur la vasomotricité cutanée, la résistance à des agressions lumineuses plus violentes par développement d’une mélano-protection, la formation de vitamine D3 indispensable à l’assimilation digestive calcique.
L’eau de mer, milieu d’origine des éléments vivants et constituant initial du milieu intérieur du règne animal, a été supputée douée de propriétés bénéfiques à la santé dès l’Antiquité grécoromaine, dont l’approche scientifique a été seulement initiée par les travaux de Quinton au début du XXe siècle [3]. L’utilisation de solutés physiologiques dont la composition se rapproche de celle des liquides extracellulaires animaux, et donc du milieu marin, en est l’expression quotidienne.
Si les gestes et modes d’utilisation des produits marins bains, douches, applications d’algues et de boues se trouvent tout à fait comparables à ceux utilisés lors des cures thermales, la présence d’un climat particulier.
La présence d’un nclimat particulier concourt fortement aux modifications environnementales présumées favorables à l’organisme fatigué ou déficient.
Les palhologies accueillies dans les centres de thalassothérapie médicalisés concernent essentiellement des affections de l’appareil locomoteur, affections rhumatismales et séquelles de traumatismes ostéo-articulaires, conduisant quelques centres, conventionnés avec les organismes de Sécurité sociale, à accueillir en tant que structures de réadaptation et rééducation fonctionnelles des patients au-delà de la période directement chirurgicale de leur affection. Il importe également de signaler les compétences et orientations de certains centres dans le domaine des maladies neurologiques : séquelles d’accident vasculaire cérébral surtout, mais également maladies invalidantes telles que les syndromes parkinsoniens.
Les maladies dermatologiques chroniques, eczéma et psoriasis en premier lieu, davantage accueillies en France dans des stations thermales spécialisées, sont également prises en charge dans le cadre de thérapeutiques héliomarines, en Allemagne et dans l’Est européen, mais aussi au Moyen- Orient grâce à l’utilisation de l’ensoleillement des rives et de l’eau extrêmement salée de la mer Morte |7|.
La plus grande part des centres de thalassothérapie d’installation récente, sur les côtes atlantiques ou méditerranéennes, dii Maroc à la Turquie et à la Grèce en passant par Malte, la Crète et la Tunisie, sont installés dans autant de lieux de grand tourisme où la notion de détente et de vacances se trouve intimement associée à des démarches de santé d’où l’expression de «tourisme de santé» [2]. Retrouver un équilibre physiologique après une période de fatigue ou de convalescence, se préoccuper du retour à un poids physiologiquement ou esthétiquement plus souhaitable, pratiquer conjointement et, si possible, de façon raisonnable et contrôléetdes activités sportives pour lesquelles ces stations disposent d’installations appropriées (piscines, tennis, golfs, sports nautiques, etc.) sont autant d’adjuvants d’activités en partie ludiques qui doivent concourir à rétablir un état de santé dans toutes ces définitions, notamment physiques et morales, du terme.
Si le suivi, voire l’engouement des cures thalassothérapiques correspond au développement d’une civilisation de loisirs, il s’inscrit également dans les aspirations à une qualité de vie prolongée pour les populations occidentales vieillissantes. Ces dernières, au-delà des années d’activité professionnelle, souffrent d’affections chroniques ou de troubles pour l’éviction ou la limitation desquels elles se montrent disposées à consentir aux nécessaires sacrifices financiers que leur permettent souvent aujourd’hui des ressources stables et suffisantes. Les limites souvent discutées entre les différentes modalités de cures, thermales ou thalassothérapiques, se trouvent davantage définies par des frontières conceptuelles et administratives que tracées par les états physiopathologiques des curistes. Les pouvoirs publics et les organismes de protection sociale, publics, privés ou mutualistes, confrontés à l’obtention ou au maintien de leurs propres équilibres financiers, souhaitent que ces frontières soient davantage affirmées.
Reste l’important problème de la démonstration de l’efficacité de l’ensemble de ces cures climatiques : si les observations des pneumologues vis-à-vis des séjours en altitude, tant à l’égard de la maladie asthmatique que des altérations bronchiques chroniques, apparaissent suffisamment probantes, il ne semble pas que des études évaluatives, suivant des méthodes épidémiologiques avec randomisation telles qu’elles ont été conduites depuis peu en thermalisme, aient été jusqu’à présent engagées. On peut cependant mettre au crédit des centres de rééducation fonctionnelle en milieu marin les résultats positifs obtenus grâce aux techniques rééducatives de diverses fonctions, notamment locomotrices. Mais existe-t-il seulement des études comparatives avec tirage au sort de cohortes de patients pour affirmer de façon chiffrée le bénéfice espéré de chacune d’entre elles?